• 08.07.22 - 23.09.22

Le Noir ne fait pas la nuit
2022
Jean-Charles Eustache
Unfriendly night, 2020

A partir du 8 juillet 2022, le FRAC Auvergne poursuit sa collaboration avec la ville de Saint-Flour et présente sa nouvelle exposition « Le noir ne fait pas la nuit » réunissant une sélection d’artistes qui s’emparent de la nuit comme toile de fond de leurs œuvres et explorent ainsi tout le potentiel narratif et la singularité chromatique qui s’en dégagent. Car, contrairement au présupposé associant la nuit à la couleur des ténèbres, l’exposition témoigne de l’incroyable réservoir chromatique et lumineux que recèle l’étendue nocturne et dans lequel les artistes puisent pour donner naissance à des représentations évoluant entre réalité, mythe et fiction.

À cette occasion, l’œuvre Unfriendly night de Jean-Charles Eustache, acquise par la collection du FRAC Auvergne en 2020, sera présentée aux côtés des œuvres de Miryam Haddad, Martial Raysse, Herbert Brandl, Rémy Jacquier, Marina Rheingantz, Gerald Petit, Anne-Laure Sacriste, Daniel Tremblay et The Caretaker.

A travers les oeuvres de cette exposition, l’image de la nuit semblable à une étendue totalement obscure ne tient plus. Il s’agit au contraire de porter son regard vers un nouvel espace propice aux apparitions et métamorphoses, comme le précise l’écrivain et peintre Henri Michaux : « Dès que je commence, dès que se trouvent mises sur la feuille de papier noir quelques couleurs, elle cesse d’être feuille et devient nuit. Les couleurs posées presque au hasard sont devenues apparitions… qui sortent de la nuit ». Le noir s’affirme non plus comme la qualité invariable de la nuit mais bien comme la condition nécessaire pour révéler couleurs et lumières. Le terme « révéler » est à entendre ici dans son sens photographique. Comme le révélateur en photographie, qui permet de faire émerger à la surface du papier les images photographiques latentes, le fond obscur de la nuit joue sensiblement le même rôle en faisant advenir des intensités lumineuses et des variations colorées, dissimulées le jour par le rayonnement trop intense du soleil.

Ainsi, les couleurs s’affirment pleinement au sein de cette exposition. Tour à tour, elles se font vaporeuses ou incandescentes, les bleus se répondent et se rejoignent pour former le nuancier – réel ou fantasmé – de la nuit, de la douceur du bleu horizon au velouté du bleu luzien chez Martial Raysse et Jean-Charles Eustache jusqu’à la force du bleu phtalo poussé à l’extrême chez Miryam Haddad. Partout, la lumière sourd depuis le fond des toiles ou de la feuille de papier et se module, des premières lueurs crépusculaires (Herbert Brandl) aux éclats fulgurants d’un feu d’artifice (Rémy Jacquier) en passant par le merveilleux scintillement d’une pluie d’étoiles (Marina Rheingantz, Gerald Petit). Le noir de l’immensité nocturne n’est jamais un noir mat, éteint. Il est, au contraire, parcouru de signes lumineux et de reflets chatoyants, comme le rappelle Anne-Laure Sacriste dans une œuvre qui emprunte son esthétique au sublime du romantisme noir du XIXe siècle.

Par sa puissance évocatrice, la nuit offre également les conditions favorables pour faire émerger une poétique qui oscille sans cesse entre fantasmagorie et symbolisme. Cet espace de temps singulier, durant lequel les choses de l’ombre surgissent, charrie en son sein nombre de visions métaphoriques liées à la mort et à l’oubli. Ainsi, le ciel de clair de lune chez Daniel Tremblay prend les allures d’un linceul tandis que la musique de The Caretaker emplit l’espace d’exposition avec des échos lointains comparables aux souvenirs incertains et parcellaires d’un rêve. En mettant en sommeil la raison, la nuit fait advenir un autre visible dans lequel les formes et les contours de notre monde, intérieur ou extérieur, se dissolvent, se métamorphosent, où tout ce qui est connu n’existe plus, favorisant un autre accès au sens. Laure Forlay Responsable du service des publics Commissaire de l’exposition

Exposition Le noir ne fait pas la nuit

Halle aux Bleds
Place de la Halle
15100, Saint-Flour